The National Times - Face aux frappes israéliennes, le guide suprême iranien joue sa survie et celle de son régime

Face aux frappes israéliennes, le guide suprême iranien joue sa survie et celle de son régime


Face aux frappes israéliennes, le guide suprême iranien joue sa survie et celle de son régime
Face aux frappes israéliennes, le guide suprême iranien joue sa survie et celle de son régime / Photo: © KHAMENEI.IR/AFP

L'ayatollah Ali Khamenei, à la tête de l'Iran depuis 1989, a surmonté de nombreux défis au cours des trois dernières décennies, mais la guerre désormais ouverte avec Israël constitue sans doute un test décisif, tant pour la République islamique que pour sa survie personnelle.

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La majorité des Iraniens n'ont jamais connu que Khamenei, à la tête du pays depuis la mort du leader de la révolution islamique de 1979, l'ayatollah Ruhollah Khomeini.

En plus de 35 ans de règne, le guide suprême iranien, aujourd'hui âgé de 86 ans, a surmonté par la répression plusieurs mouvements de protestation, dont le dernier, le mouvement Femme Vie Liberté, a ébranlé en 2022-2023 les fondations religieuses de la République islamique, avant d'être maté au prix de plusieurs centaines de morts et de milliers d'arrestations, selon des ONG.

Vétéran de la guerre Iran-Irak (1980-1988), il a survécu à une tentative d'assassinat en 1981, qui l'a laissé paralysé du bras droit. Depuis sa prise de fonction, il n'a jamais quitté l'Iran - sa dernière visite à l'étranger était en Corée du Nord en 1989, alors qu'il était président - et ses déplacements sont secrets et extrêmement sécurisés.

Et il ne devrait aujourd'hui sa survie qu'au président américain Donald Trump lui-même. "Nous avons découvert que les Israéliens projetaient de cibler le guide suprême iranien. Le président Trump était contre et nous leur avons dit de ne pas le faire", a ainsi déclaré dimanche un responsable américain à l'AFP, sous couvert d'anonymat.

- Changement de régime ? -

La question de sa succession plane depuis quelques années en Iran. "Khamenei est au crépuscule de son règne, à 86 ans, et une grande partie du pouvoir quotidien ne dépend pas de lui mais de plusieurs factions qui se disputent le pouvoir", selon Arash Azizi, chercheur à Boston University.

"Le processus était déjà en cours et la guerre actuelle ne fait que l'accélérer", souligne-t-il à l'AFP.

Israël a lancé le 13 juin une attaque d'une ampleur sans précédent sur l'Iran, visant des centaines de cibles militaires et nucléaires, avec l'objectif affiché d'empêcher le pays de se doter de la bombe atomique. Plusieurs dirigeants des Gardiens de la Révolution ont été tués, dont les trois plus hauts gradés du pays, illustrant le niveau d'infiltration israélien en Iran.

Dans un entretien sur Fox News dimanche, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a laissé entendre qu'un changement de régime pourrait être un des objectifs des frappes israéliennes.

"Cela pourrait certainement être le résultat, compte tenu de la faiblesse du régime iranien", a-t-il dit, ajoutant que "80% de la population" iranienne était opposée au pouvoir actuel.

"Il est possible qu'Israël ait un plan en soutenant un coup d'Etat interne ou en continuant à tuer les plus hauts dirigeants en espérant que cela aboutira à un changement de régime", estime M. Azizi.

L'opposition iranienne reste minée par ses divisions. Reza Pahlavi, fils de l'ancien shah et figure de l'opposition en exil, qui entretient de bonnes relations avec Israël, a lancé aux Iraniens: "Restez forts et nous vaincrons".

"Mais les grandes considérations sur le changement de régime, ce n'est pas la première préoccupation des gens, là", indique à l'AFP une franco-iranienne dont la famille vit à Téhéran, décrivant la "panique généralisée" qui s'est emparée des Iraniens face aux frappes israéliennes.

- "Erreur de calcul" -

Tout en ayant toujours usé de la rhétorique de la confrontation avec les Etats-Unis et Israël, et soutenu les alliés régionaux de l'Iran comme le Hezbollah au Liban, Khamenei a toujours tenu son pays à l'écart de conflits directs. La guerre actuelle marque l'échec de cette stratégie.

"Il se félicitait d'avoir contenu les conflits loin des frontières de l'Iran depuis sa prise de fonction en 1989", rappelle Jason Brodsky, de l'organisation basée aux Etats-Unis United Against Nuclear Iran (UANI). "Khamenei a fait une grosse erreur de calcul".

Au début des années 80, plusieurs hauts dirigeants dont le président et le chef de l'autorité judiciaire avaient été tués dans des assassinats imputés à l'opposition.

"Mais ce qui se passe aujourd'hui est d'une toute autre ampleur", relève M. Brodsky.

Les frappes israéliennes ont fait au moins 224 morts et plus d'un millier de blessés en Iran, selon un bilan officiel établi dimanche.

Les salves de missiles iraniens tirées en riposte sur Israël ont fait 24 morts depuis vendredi, selon le bureau du Premier ministre israélien. Ce bilan s'est alourdi lundi de onze morts, dont huit tués pendant la nuit à Petah-Tikva, Bnei-Brak et Haïfa.

T.Ward--TNT