
L'ONU déclare la famine à Gaza, Israël dénonce un "mensonge"

L'ONU a officiellement déclaré une famine à Gaza vendredi, un "mensonge éhonté" selon le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, dont le gouvernement menace de destruction totale la ville de Gaza si le Hamas n'accepte pas la paix à ses conditions.
"C'est une famine, la famine de Gaza", qui "aurait pu être évitée" sans "l'obstruction systématique d'Israël", a déclaré à Genève le chef des opérations humanitaires des Nations unies, Tom Fletcher.
"Israël n'a pas de politique de famine. Israël a une politique de prévention de la famine", a rétorqué M. Netanyahu, imputant des pénuries, selon lui "temporaires", aux "vols systématiques de l'aide" par le Hamas, dont l'attaque sans précédent le 7 octobre 2023 contre Israël a déclenché la guerre en cours.
Après des mois d'alertes de l'ONU et d'ONG humanitaires, le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) onusien, a confirmé qu'une famine était en cours dans le gouvernorat de Gaza (nord).
Le Hamas a appelé à "une action immédiate de l'ONU" pour stopper la guerre, et "l'ouverture sans restriction des points de passage" en vue de "l'entrée urgente et continue de nourriture, médicaments, eau et carburant".
Selon des experts de l'ONU, plus d'un demi-million de Gazaouis affrontent des conditions "catastrophiques", le niveau de détresse alimentaire le plus élevé de l'IPC, caractérisé par la famine et la mort.
- "Scandale moral" -
"Il n'y a pas de famine à Gaza", ont affirmé les Affaires étrangères israéliennes, accusant l'IPC d'avoir pondu "un rapport fabriqué 'sur-mesure' pour [le] Hamas".
Chaque jour des journalistes de l'AFP dans la bande de Gaza voient des foules de Palestiniens de tous âges se ruer sur des distributions alimentaires, dont plusieurs ont provoqué des scènes chaotiques et meurtrières, avec l'énergie du désespoir.
Selon l'IPC, la famine devrait gagner les gouvernorats de Deir el-Balah (centre) et Khan Younès (sud) d'ici fin septembre.
L'ONU estime à près d'un million de personnes la population actuelle du gouvernorat de Gaza (Gaza-ville et ses environs) tandis que près d'un demi-million d'autres se trouveraient dans celui de Deir el-Balah, et plus de 500.000 dans celui de Khan Younès.
"Affamer des gens à des fins militaires est un crime de guerre", a rappelé le haut-commissaire aux droits de l'Homme de l'ONU, Volker Türk.
- "Portes de l'enfer" -
Le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a appelé à un "cessez-le-feu immédiat, la libération immédiate de tous les otages et un accès humanitaire total".
Israël avait imposé début mars un total blocus humanitaire aux Gazaouis, entraînant de graves pénuries de nourriture.
Il l'a assoupli à partir de fin mai, mais l'aide internationale autorisée à entrer depuis lors est jugée largement insuffisante par l'ONU et les humanitaires, ce que conteste Israël.
En matière militaire, le ministre de la Défense israélien, Israël Katz, a menacé la ville de Gaza de destruction totale si le mouvement islamiste palestinien n'acceptait pas la paix aux termes israéliens.
"Bientôt, les portes de l'enfer s'ouvriront" jusqu'à ce que le Hamas accepte "les conditions" israéliennes pour mettre fin à la guerre, "principalement la libération de tous les otages et (son) désarmement" a-t-il écrit sur X.
Jeudi soir, M. Netanyahu, avait ordonné l'ouverture de négociations pour "la libération de tous (les) otages" et la fin de la guerre "dans des conditions acceptables pour Israël".
- "Souhaiter la mort" -
Une proposition des médiateurs - Egypte, Qatar et Etats-Unis - en vue d'un cessez-le-feu, acceptée lundi par le Hamas, prévoit, selon des sources palestiniennes, une trêve de 60 jours durant laquelle les otages toujours captifs à Gaza - 49 dont 27 morts selon l'armée - seraient relâchés en deux temps en échange de prisonniers palestiniens.
Israël, qui contrôle environ 75% du territoire palestinien, a approuvé cette semaine un plan d'assaut contre Gaza-ville, et annoncé le rappel de 60.000 réservistes supplémentaires.
Depuis, l'étau militaire se resserre sur Gaza-ville.
La Défense civile de la bande de Gaza a recensé vendredi 57 personnes tuées dans des frappes et tirs israéliens sur l'ensemble du territoire.
Compte tenu des restrictions imposées par Israël aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante ce bilan.
"C'est comme si nous étions en enfer. Je deviens folle", déclare à l'AFP Oum Ibrahim Younès, une mère de quatre enfants de 43 ans, qui vit dans les ruines de sa maison à Gaza.
"Nous attendons la mort, nous en sommes venus à la souhaiter", témoigne Nivine Ahmed, 47 ans, déplacée avec ses cinq enfants dans une tente à l'ouest de Gaza.
L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.
La campagne de représailles israéliennes a fait au moins 62.192 morts dans la bande de Gaza, en majorité des civils, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU.
D.Cook--TNT